vendredi 24 février 2012

Intelligence vocale et libérée

Information
Bof... c'est le week-end. Juste un podcast... Oh puis non, une petite retranscription en primer.

eMedia 
L'émission La Voix est libre sur Radio Notre-Dame du vendredi 24 février 2012 avait pour thème Qu’est-ce que l’intelligence économique ? Le podcast en mp3 (ziP+html) est à portée de clic (podcast original). Les invités de Sabine de Rozières :
Suit une retranscription rapide. Les propos  "hors guillemets" sont des retranscriptions personnelles inspirées des propos réellement tenus, se référer à l’enregistrement.

Qu'est-ce que l'intelligence économique en pratique ?
 Christian Harbulot (CH) : comment utiliser l'information pour se développer dans un cadre de compétition tel qu'il existe aujourd'hui ; j'insiste sur se développer plutôt que sur "se protéger [NDLR : revenant sur l'introduction de l'émission]

Camille Allouin (CA) : un état d'esprit qui considère les stratégies de l'entreprise sur le prisme de l'information [...] d'articuler un ensemble d'outils et de méthodologies [...] pour la mise en place de stratégie concurrentielle ou pour, plus simplement, la gestion de l'information en interne ou en externe

CH : étant dans la société d'information, on est condamnée à avoir une réflexion sur l'usage de l'information. "Dans les entreprises, on ne sait pas créer une mémoire. Un exemple : EDF quitte l'Algérie [[suite aux évènements]] puis y retourne" en ayant perdu l’information sur les cadres qui y étaient, leurs carnets d'adresse, leur réseaux. Dans une société où il y a beaucoup de technologie (de l'information en particulier) "on n'a toujours pas créé une habitude utile, fonctionnelle sur l'usage de la mémoire".

A-t-on trouvé un (super)-modèle de l'intelligence économique, sur ce sujet en mutation ?
 CH : "on est vraiment au début d'un processus". La rotation des cadres dans les entreprises empêchent la constitution de mémoire d'entreprise ; pourtant "la mémoire est fondamentale" elle permet "d'économiser de l'argent" "de transmettre du savoir", "de ne pas recommencer des erreurs".
Mais tout cela, qui était dans le rapport Martre il y a vingt ans, "on n'y est toujours pas".

CA : "il y a un manque de formalisation des pratiques dans les entreprises" (exemple sur les TPE - très petites entreprises - à l'occasion d'une formation) alors que bien qu'à développer encore, il existe des modèles (de gestion de l'information).

CH : l'information est tellement banalisée dans l'esprit des gens, mais il reste des gisements de développement, "un manque à gagner lié" [...] "à une non-prise en compte de ce qu'est l'information".

L'origine de l'intelligence économique ?
CH : au milieu des années 70, les pionniers en France, "émanant du commissariat général au plan, essayent de comprendre en quoi l'information peut être un avantage compétitif. le premier milieu à professionnaliser la démarche est la veille technologique"

Les acteurs ?
CH : très variés ; un marché privé de l'information (cabinets de conseils, vendeurs de logiciels de gestion des connaissances). Pour faire simple : ceux qui vendent des outils, ceux qui conseillent, ceux qui sécurisent et ceux qui sont en première ligne sur les affrontements concurrentiels, avec des volumes très différents pour chacun.

CA : la France est le deuxième ou troisième pays producteur d'outils de veille dans le monde, ce qui répond à une forte culture d'ingénieur. Le défaut : dans le monde de l'entreprise, on pense (trop) souvent outils et technologies avant de penser méthode ou stratégie "et c'est un des freins au développement de l'intelligence économique voire même de la gestion de l'information de manière globale". D'abord "on choisit l'outil et après on réfléchit à ce qu'on va en faire"

Je travaille dans intelligence économique, ça veut dire quoi ?
CH : si on prend la première fonction, chercher l'information, c'est pas se limiter à Google (ce que croient beaucoup d’étudiants ou une majorité de la politique d'ingénieur) : "les fonctions avancées de Google, c'est catastrophique". "Il y a une offre française qui mériterait d'être connue beaucoup plus qu'elle ne l'est".

CH : "Google c'est gratuit, mais d'abord c'est pas tout a fait innocent et en plus c'est pas très performant." "Dès qu'on essaye de chercher de l'information a forte valeur ajoutée, ça coute de l'argent". Alors on se rabat sur l'information gratuite mais qui ne donne pas le même type de résultats.

Tout se joue sur le web, ou sur le terrain ?
CA : "la tendance a ne plus recourir au monde physique" est dangereuse, si on ne vérifie

CH : sur un examen en cours sur les industries de proximités et si possibles non délocalisables. Applications sur le compteur "intelligent" http://linky.erdfdistribution.fr/, création locale d'activité lié à un compteur électrique "smart grid". On ne peut se contenter d'internet. "La recherche d'information, pour qu'elle soit performantes, elle doit cumuler des interviews d'experts, elle doit passer par des visites de salon, elle doit obligatoirement aussi passer par des expériences de terrain, des remontées d'information, et ça marche."

CH : "dans la construction navale, de paquebots de plaisance, un des derniers domaines qu'on maitrise, un groupe japonais vient de lancer un nouveau paquebot en pratiquant le dumping, c'est évident qu'il ne peut pas le faire seul, et il y a derrière des acteurs un peu plus puissants que lui, et ça déstabilise quatre pays européens qui construisent des paquebots de plaisance."

CA : rappel de l'affaire Nestlé vs. Greenpace et les orangs-outangs subissant la déforestation pour l'huile de palme. L'usage de termes guerrier autour de l'intelligence économique peut avoir un sens, mais peut nuire à l'image auprès des entreprises et du public.

CH : s'il y a des problèmes liés à l'euro, à l'endettement européen, la question d'une stratégie américaine visant à affaiblir l'Europe pour éviter d'avoir à se battre sur deux fronts, le front chinois étant prioritaire. Les États-Unis appliquent-ils à l'Europe la méthode employée contre le Japon dans les années 8O ? [[CH cite étonnamment une émission de France Culture "dimanche dernier", avec un entretien et des propos entre Valéry Giscard D'Estaing et Jean-Marie Colombani, émission du 3 décembre 2011 en fait]]. Si cette question n'est pas abordée par des professionnels de l'IE, qui va le faire ?

Quelle différence entre intelligence économique et espionnage industriel ?
CH : "Elle est fondamentale" : l'intelligence économique a été créée autour de l'information "accessible", soit gratuite, soit qu'on peut acheter. L'autre domaine est celui des pratiques illégale pour accéder à l'information.

Savoir où mangent les salaries, ingénieurs, patrons d'une entreprise, et missionner des gens dans ce restaurant pour glaner des informations, est-ce de l'intelligence économique ?
CH : c'est exploiter la paresse, la naïveté, la maladresse, en citant un exemple de réunions dans un hôtel par Airbus, près de Toulouse, et la présence de cadres d'un groupe étranger.

CA : citation de Guy Massé : "Mentir c'est tricher, omettre c'est ruser". Le problème est celui de l'éthique. La définition de l'information est un peu différente dans les pays anglo-saxons, cf. le lobbying. D'où une perception médiatique troublée.

Quelle culture du secret ?
CA : la difficulté quand on se présente, c'est de définir ce qu'est l'intelligence économique. Le problème est plutôt celui de ceux qui se revendiquent de l'intelligence économique et qui versent plus dans l'illégal et notamment l'espionnage industriel.

CH : dans toutes les professions il y a des vilains petits canards.

Les défis ?
CH : retour sur un contrat de deux centrales atomiques à la Chine, ou la France était en concurrence avec l'Allemagne. Risquant de perdre le contrat pour un défaut de formation, une femme politique française a suggéré à l'entreprise de doubler ce temps de formation, et la France aurait obtenu ce contrat. Un ministère "orienté vers l'extérieur" se serait plaint que c'était une mauvaise pratique.

Si tous les autres pays pratiquent le renseignement économique, la culture française de la beauté du geste comparée à celle du résultat peut se révéler défaillante.

CH : Il y a là un défi du domaine politique : l'état ne doit pas accompagner le mouvement, mais être stratège. La France a le deuxième domaine maritime au monde, et pas de programme opérationnel venant d'une task-force politique. On est très performant dans l'industrie du drone, mais les industrielles françaises sont totalement incapables à créer cette fameuse task-force (chasser en meute comme les Allemands ou les Japonais). Là, le politique doit arbitrer et devient stratège en forçant les entreprises à s'unir. Un industriel n'est pas forcement patriote : cf. cette activité de production de méthanier est passé en Corée du sud (Chantiers de l'Atlantique devenu Aker Yards hier et GTT aujourd'hui).

CA : les entreprises ont trop tendances (en Poitou-Charente notamment) à s'appuyer sur ces stratégies, parfois trop politisées. Sur l'exemple de La poste (achat de mobylettes coréennes), se pose la question de la nationalité de l'entreprise.

CH : se pose une question du temps, qui va au delà de l'échéance électorale, que l'homme politique ne sait pas gérer actuellement.

CH : le Japon de l'ère Meiji s'est beaucoup appuyé sur l'information pour se développer [[article sur le Jetro sur le protail de l'IE]]. Le savoir faire de gagner par l'indirect est a étudier au Japon, en Chine, en Corée, voire en Inde et dans les petits dragons, que l'on retrouve dans Sun Tzu.

Lien
Sur le même sujet, ou presque, le blog d'Olivier Soula (Pensée Action !) se demande Qu'est-ce que l'intelligence économique ? (Non vraiment, sérieux, qu'est-ce que c'est ?)

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